08/09/2006
La voix
Prêchant un jour devant une grande assistance, Rabbi Mikhal prononça ces mots: «Ce que je dis, il faut l’écouter.» Il ajouta aussitôt: « C’est à dessein que je n’ai pas commandé: ‹Écoutez ce que je dis›, mais bien : ‹ce que je dis, il faut l’écouter›. Car j’entends par là que moi aussi, je suis tenu d’écouter ce que je dis. »
Cité par François Fédier, exergue à Voix de l'ami, paru sur le site de Stéphane Zagdanski,
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11/08/2006
Trois anecdotes
Lors d’une rencontre (la deuxième) avec w, nous parcourons ensemble une exposition consacrée à un oncle de sa famille, peintre actif dans les années 30 à 70 environ. Après la visite, je résume dans un carnet les anecdotes que w me raconte et dont je me souviens. Je me rends compte qu’elles tournent toutes autour d’un thème commun: le peintre vaincu.
Voici ces anecdotes.
w rend visite au peintre âgé. Celui-ci lui propose de choisir une peinture qu’il pourra emporter. w opte pour un autoportrait du peintre qui lui semble dégager une paix intérieure, une sérénité (le peintre s’est semble-t-il représenté les yeux fermés) qui correspondent à l’image qu’il se fait de ce presque vieillard qui a consacré sa vie à la peindre.
Il apprend plus tard que ce portrait a été réalisé dans une période de profonde dépression, juste avant ou juste après une tentative de suicide.
w raconte l’histoire suivante: l’oncle peintre travaillait à Paris dans les années 30. Après une période symboliste, il se lance dans une série de peintures «transparentes». Dans celles-ci, une ou plusieurs figures, souvent féminines, sont représentées de telle façon que le paysage derrière elle semble les traverser. Il expose à ce moment là dans la même galerie que Francis Picabia. Picabia voit ces peintures et réalise une série selon le même principe. Ces peintures apporteront à Picabia gloire et fortune alors que l’oncle qui a mis au point le procédé sera négligé.
À la fin de sa vie, le peintre, revenu en Suisse, se lie avec Ramuz. De cette amitié naîtra le projet d’une nouvelle édition de l’Adam et Ève de l’écrivain, illustré par le peintre.
À partir de 7 peintures préparatoires, l’oncle peintre réalise 7 dessins qui devront aboutir à 7 lithographies destinées au livre.
Suite à des complications de la part de l’éditeur, le livre ne sera jamais réalisé. L’oncle peintre continue néanmoins ses variations sur le thème. Sa toute dernière peinture, probablement inachevée, reprend l’un des sujets illustrant Adam et Ève: on y voit Bolomey (le héros du livre de Ramuz) perché sur un arbre, la nuit, son visage reflété dans l’eau du Léman. (Je crois me souvenir qu’il observe un couple enlacé au bord de l’eau.)
Selon w, le visage de Bolomey a les traits de l’oncle peintre qui meurt noyé quelques temps après.
À ces anecdotes s’ajoutent des impressions relevées lors de la visite de l'exposition, quelques images.
Une chambre avec un balcon dont on voit la balustrade forgée, vue sur le Léman, assez lointain. (J’apprends que la chambre en question est située tout près de chez moi, sous le Parc Mon-Repos), des figures féminines font la sieste ou lisent. Parmi elles, l’épouse de w.
Une vision récurrente pendant la période symboliste: un cœur suspendu, derrière les barreaux d’une clôture de parc; ce cœur est ceint d’un branchage épineux.
Une goutte de sang s’en écoule.
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