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08/08/2006

p.s. à «Et dit merde (readymade)»

Le jeu de mot est contagieux mais avec Duchamp c'est encore pire: il n'arrête jamais et ça enclenche une machine folle. Bon, un petit dernier.
Je m'interrogeais sur ces jeux incessants sur la lettre «r», qu'on prononce air ou erre en français, et art ou arrhe en anglais: «air de Paris», Rrose Sélavy, bec Auer (a ou r), R. Mutt, etc. (Une étude sur la lettre R chez Duchamp ici) Je me disais, en bon Freudien de café du commerce, que ça devait remonter loin, à l'enfance, et donc porter sur son nom. Or, pas de «r» dans Duchamp. Et soudain, bing! Marcel, bien sûr!
Ma selle m'harcèle. M'art cèle ma selle. C'était pourtant évident, merde!

07/08/2006

Et dit merde (readymade)

La merde a de l’avenir. Vous verrez qu’un jour on en fera des discours.
Louis-Ferdinand Céline.



L'équation art=merde a encore de beaux jours devant elle. Une petite revue de blogs et de sites qui abordent la question, ici, ici et entre mille autres. Je vous propose ici ma modeste contribution.

Le point de départ est la fameuse proposition de Duchamp Marcel: «Arrhe est à art ce que merdre est à merde» mise en rapport avec une phrase du peintre Eugène Leroy: «Je veux bien qu'on dise [de ma peinture] que c'est du caca, mais pas que c'est de la merde».

Ma question: quelle différence entre merde et caca? le salaire de la merde est-il préférable à celui du caca? où se cache le caca quand s'échange la merde sur le marché de l'arrhe?

Prenons les deux cas les plus illustres, tels qu'on les trouve résumés dans un article de Wikipédia sobrement intitulé «Matière fécale»: En 1961 l'artiste Piero Manzoni créa son œuvre provocatrice Merda d'artista.
En 2000, Wim Delvoye crée Cloaca, un tube digestif humain géant et fonctionnel. Cloaca produit après un traitement de 27 heures, des excréments qui sont ensuite vendus.

Chez Piero Manzoni, le caca est scellé hermétiquement dans une boîte de conserve. On n'en voit rien, on ne sent rien. La seule indication de ce qui se trouve dans la boîte est l'inscription Merda d'artista qui y est collée.
Chez Wim Delvoye, par contre, tout est visible: la machine est en grande partie en verre, transparente. Ce qui en sort ressemble à de la merde, c'est un excrément fabriqué «naturellement» par une machine, mais est-ce vraiment du caca?

Nous avons donc d'une part une merde déclarée, énoncée, et un caca invisible, d'autre part une merde fabriquée, visible, et un caca artificiel. Le tout étant commercialisé.
Ce qui se commercialise n'est donc pas le caca, mais le discours sur le caca; ce discours étant appelé ici «merde».
Le caca est enfantin, individuel, pulsionnel et gratuit, la merde est adulte, sociale, contractuelle et payante (au prix de l'or dans le cas de Manzoni).

Je propose de faire avancer la réflexion sur la peinture en posant cette nouvelle équation: peinture est à art ce que caca est à merde.