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19/12/2006

cut-up et exaltation (réponse à sz)

Je reçois ce commentaire de sz à propos de la note «Notes sur le dessin» du 2 décembre 2006: C'est Lipcare qui écrit? Il adresse à de Palma? (Pourquoi de Palma?) -Ou il le paraphrase? Le cite? S'en moque? Rien de tout ça? Il brouille les pistes? Quelles pistes?

Eléments de réponse: ce texte est un cut-up. Je ne sais pas s'il suit vraiment les règles du cut-up, mais il me semble que c'est la meilleure définition. Il est donc bien de Lipcare, il ne paraphrase, ni ne moque, ni ne brouille les pistes. Voici comment il est né: je lisais un article dans la revue artpress consacré au dernier film de Brian de Palma. On peut imaginer le ton de l'article, un peu «cahiers-du-cinéma»,  lustrant le cinématographème par tous les trous du hors-champs, érudit mais empathique, élogieux mais familier. Baillements. Pourtant une petite musique me bourdonne à l'oreille, je transforme un tout petit peu le texte, directement, en lisant, et ça commence à me parler. Ce que j'ai fait est simple: j'ai pris tous les verbes, à la suite, et je les ai fait précéder d'un «il faut», et puis j'y ai accollé les compléments les plus proches. C'est tout, sans en omettre aucun et sans choisir. On pourrait dire que c'est un cut-up «aidé».

La question de sz m'a permis de me demander pourquoi j'ai été jusqu'à transcrire ce petit execice et à le proposer ici. Le cut-up est une technique très répandue dans nos villages, de même que ses cousins visuels: le découpage, le silhouettage et le pseudo-moulage polymérisé.

Le découpage a cette vertu de de faire naître une pensée ou une image non par construction, mais par évidement. Il y a d'abord une mise à plat: des sources, des matières, des documents. Puis on creuse. C'est la même chose avec l'assemblage, le collage, la citation (techniques abondamment utilisées dans la Fresh Theory, par exemple), ce qui compte ce n'est pas ce qu'on colle ensemble, mais la colle qu'on utilise. La pensée naît dans l'espace compris entre les blocs de textes, de matières, d'histoires.

On crée du vide.

Cette technique suppose de faire sacrément confiance à la matière, aux histoires,  aux textes, pour espérer que leur évidement fasse sens. La matière utilisée n'est jamais remise en question, elle est a priori utilisable. Les textes découpés et assemblés dans le cas du cut up, la matière noire de la silhouette, dans le cas du découpage sont rongés, sculptés, aménagés par celui qui s'en empare sans permission. Les textes, la matière noire ne sont tolérés que dans la mesure où ils permettent, par leur effacement, d'ouvrir ce vide où un nouveau sens s'installe en colonisateur. Le cut up est un pervers, un impérialiste.

Dans mon petit cut up du 2 décembre, j'ai fait ça; j'ai utilisé un texte, je l'ai découpé et réassemblé. J'y ai introduit une voix prophétique: «Il faut, il faut, il faut…», voilà.

Aujourd'hui, je me dis qu'il y a peut-être un rapport ethymologique à trouver entre le découpage et la voix prophétique, entre le cut/up et l'ex/altant.

 

 

 

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